Bernard Malamud, L’homme de Kiev, Editions Payot & Rivages, 2015.

« Une chose que j’aurai apprise (…) c’est que personne ne peut se permettre d’être apolitique, et surtout pas un Juif. Impossible d’être juif et apolitique, c’est clair. On ne peut pas rester assis à se laisser tranquillement détruire. Puis il pensa : là où l’on ne se bat pas pour la liberté, elle n’existe pas. »

Ces quelques lignes de l’épilogue de L’Homme de Kiev résument la force qui anime Yakov Bok, protagoniste principal du livre de Malamud. Comme dans toute son œuvre, le lecteur suit le parcours d’un personnage dont la somme des épreuves est autant d’expériences formatrices, dans un récit où s’entremêlent sentiments amoureux, souffrance et rédemption. Yakov quitte son shtetel pour s’installer à Kiev dans l’espoir d’une vie meilleure. Mais la découverte du corps mutilé d’un enfant bouleverse son existence. Oui, parce que Yakov est juif, il est le coupable idéal dans la Russie de Nicolas II, cette Russie d’après la Révolution de 1905 qui voit vaciller le pouvoir du tsar et dans laquelle la peur et la haine de l’Autre s’exacerbent.
Le roman de Bernard Malamud s’inspire de l’histoire du briquetier juif Mendel Beiliss arrêté en 1911 sous le prétexte du meurtre rituel d’un enfant chrétien dont il aurait aspiré le sang pour confectionner des galettes de Pâques. Deux ans plus tard, après de multiples sévices et à la suite d’une vigoureuse campagne de presse, Beiliss est officiellement acquitté faute de preuves et contraint à s’exiler aux États-Unis, où il meurt peu avant la guerre. Cependant, publié en 1966, L’Homme de Kiev fait également écho au contexte de revendications des droits civiques aux Etats-Unis sur fond d’exactions d’organisations ségrégationnistes telles que le Ku Klux Klan.
Dès lors, l’œuvre de Malamud explore les mécanismes de l’inconscient collectif et de l’hystérie populaire dans une société prête à condamner un innocent pour protéger ses privilèges. Si l’auteur développe la thématique de l’antisémitisme, c’est aussi pour mieux condamner toutes les formes d’intolérance, de rejet et de rappeler la nécessité de l’engagement individuel pour défendre l’humanité.
Dans sa préface, Jonathan Safran Foer, note que « notre monde -aussi désespéré et détraqué soit-il- a besoin de roman existentiels, de roman qui nous apportent un bien plus précieux que l’espoir : un appel à l’action. Le véritable réparateur n’est pas Yakov Bok (…). Et ce n’est pas non plus Bernard Malamud (…). Le véritable réparateur, c’est chacun de nous. Nous devons agir. Voilà ce que ce roman, comme tous les chefs-d’œuvre, nous rappelle ».

A NOTER :
Le roman de Bernard Malamud a été adapté au cinéma par John Frankenheimer en 1968, avec Alan Bates dans le rôle de Yakov Bok. Le scénario est signé Dalton Trumbo.

Article écrit à l’origine pour le site Sifriatenou

 

‘There was a time…’: Jewish Family Photographs Before 1939 

Exposition du 17 janvier au 10 février

A l’occasion de la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste (27 janvier), … L’UNESCO accueille l’exposition de la Wiener Holocaust Library « Il était une fois…. Photographies de familles juives avant 1939 » sur les clôtures extérieures de l’UNESCO pour présenter la richesse et à la diversité de la vie juive en Europe avant la Seconde Guerre mondiale. L’exposition vise à rendre hommage à l’individualité et à l’humanité des hommes, des femmes et des enfants juifs qui ont été assassinés par les nazis et leurs collaborateurs, et à sensibiliser le public aux communautés et aux cultures disparues à travers l’Europe.”…

De l’antiquité à aujourd’hui, une longue histoire de l’antisémitisme

Histoire de l’antisémitisme en 4 volets sur Arte, comme un cours d’histoire en 4 chapitres.

” Pourquoi la haine des Juifs n’a-t-elle cessé de renaître au fil des époques ? De l’antijudaïsme à l’antisémitisme moderne, cette série documentaire explore les multiples facettes du phénomène, de ses origines jusqu’à nos jours. Sur fond de commentaire et d’analyse d’une trentaine d’experts internationaux, le récit s’appuie à la fois sur un corpus d’archives et sur des images historiques en 3D.”

Histoire de l’antisémitisme :

(1/4) Aux origines, 38-1144 (53′) / (2/4) Le temps du rejet, 1144-1791 (57′) / (3/4) De l’émancipation à la Shoah, 1791-1945 (58′) / (4/4) Les nouveaux visages de l’antisémitisme, 1945 à nos jours (57′)

La montée de l’antisémitisme en Autriche : de la Belle Époque à la Shoah

Hans Zatzka / Apotheose auf Dr KarlLueger.
https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Hans_Zatzka_Apotheose_auf_Dr_Karl_Lueger.jpg

Si Vienne de la Belle Époque, dès 1867, était l’une des capitales de la modernité intellectuelle, littéraire et artistique des plus fécondes, dans le même temps, elle porte en elle une terrible mémoire de l’antisémitisme… A partir de 1938, le “monde d’hier” évoqué par Stefan Zweig s’effondre… L’histoire de la Shoah imprègne alors cette modernité. Retrouvons ci-dessous l’éclairage de Jacques Le Rider (Historien spécialiste de l’Autriche, directeur d’étude à l’École des Hautes Études, ancien directeur de l’institut français de Vienne).

Dans le cadre du cycle de Conférences Naissance d’un nouveau monde : l’Europe centrale et orientale entre 1918 et 1939 à la Bibliothèque Nationale de France (BnF) voici le texte de la conférence de Jacques Le Rider intitulé : Les Juifs viennois de 1918 à la Shoah – Texte de la conférence disponible (conférence du 20 janvier 2021)

Racisme, antisémitisme, xénophobie : des clés pour comprendre et pour agir.

Compte-rendu d’une journée de formation organisée autour d’un cycle de conférences pensé comme un regard croisé de différentes disciplines afin de comprendre au mieux des phénomènes aussi complexes que le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie ; aux analyses historiques se sont donc associées les lectures philosophiques et juridiques.

Racisme Actes Formation 2016